Préambule
Chers membres de Domvs Christiani,
Voici donc le « kit 1 » pour la Lectio Divina que votre groupe a choisi de réaliser durant cette année Domvs Christiani.
Le texte proposé est extrait de la première Épître de saint Pierre. C’est l’occasion d’apprendre à rentrer dans un autre genre littéraire que celui des Évangiles et de mieux connaître le Prince des Apôtres, dont le style cordial est très roboratif.
Vous trouverez donc ici
– pour la Lectio Divina de cette année :
LD 1 : le présent préambule
LD 2 : le texte (1P 2,11-25)
LD 3 : un questionnaire qui prépare la Lectio divina LD 4 : des extraits de divers commentaires
– pour la Lectio Divina en général :
LD A : un article de « Famille chrétienne » donnant une vue d’ensemble sur la Lectio divina
LD B : quelques beaux textes du Magistère
LD C : un résumé sur les sens bibliques
« La vie du chrétien est une vie de foi fondée sur la Parole de Dieu et nourrie par elle. » (Benoît XVI, 27 janvier 2006).
Bonne et sainte Lectio !
La coordination Générale de Domvs Christiani
Domvs Christiani 2021-2022
Vous pouvez télécharger les documents en pdf ci-dessous ou poursuivre la lecture de cet article…
La soumission au nom du Christ – 1P 2,11-25
11 Très chers, je vous exhorte, comme étrangers et voyageurs, à vous abstenir des désirs charnels, qui font la guerre à l’âme. 12 Ayez au milieu des nations une belle conduite afin que, sur le point même où ils vous calomnient comme malfaiteurs, la vue de vos bonnes œuvres les amène à glorifier Dieu, au jour de sa Visite.
13 Soyez soumis, à cause du Seigneur, à toute institution humaine : soit au roi, comme souverain, 14 soit aux gouverneurs, comme envoyés par lui pour punir ceux qui font le mal et féliciter ceux qui font le bien. 15 Car c’est la volonté de Dieu qu’en faisant le bien vous fermiez la bouche à l’ignorance des insensés. 16 Agissez en hommes libres, non pas en hommes qui font de la liberté un voile sur leur malice, mais en serviteurs de Dieu. 17 Honorez tout le monde, aimez vos frères, craignez Dieu, honorez le roi.
18 Vous les domestiques, soyez soumis à vos maîtres, avec une profonde crainte, non seulement aux bons et aux bienveillants, mais aussi aux difficiles. 19 Car c’est une grâce que de supporter, par égard pour Dieu, des peines que l’on souffre injustement. 20 Quelle gloire, en effet, à supporter les coups si vous avez commis une faute ? Mais si, faisant le bien, vous supportez la souffrance, c’est une grâce auprès de Dieu.
21 Or, c’est à cela que vous avez été appelés, car le Christ aussi a souffert pour vous, vous laissant un modèle afin que vous suiviez ses traces, 22 lui qui n’a pas commis de faute – et il ne s’est pas trouvé de fourberie dans sa bouche ; 23 lui qui insulté ne rendait pas l’insulte, souffrant ne menaçait pas, mais s’en remettait à Celui qui juge avec justice ; 24 lui qui, sur le bois, a porté lui- même nos fautes dans son corps, afin que, morts à nos fautes, nous vivions pour la justice ; lui dont la meurtrissure vous a guéris. 25 Car vous étiez égarés comme des brebis, mais à présent vous êtes retournés vers le pasteur et le gardien de vos âmes.
Traduction de la Bible de Jérusalem
Questions & Pistes de réflexion
NB : ces questions préparent la Lectio Divina qui aura lieu en groupe ; mais elles n’en seront pas la trame !
I. Quelques pistes…
– Après avoir lu l’extrait une fois, posez-vous ces quelques questions :
1. Quel est le contexte de ce passage ?
2. Les versets 11-12 reprennent la thématique générale de l’Épître (thématique par ailleurs très actuelle). Voyez-vous ce dont il s’agit ? On pourra s’aider en relisant le tout premier verset de l’Épître.
3. Quelles sont les deux parties de cet extrait ? (elles sont marquées par les deux vocatifs)
4. Comment résumer la première partie ? La seconde ? Chacune des deux parties enseigne sur une valeur spirituelle de l’obéissance ; lesquelles ?
5. Quel passage célèbre de l’Ancien Testament inspire la fin de l’extrait ? Comment cela éclaire-t-il le verset 16 ? Si vous ne trouvez pas, allez voir la lecture de la messe du Mercredi Saint.
6. Le verset 17 mérite de s’attarder un peu : comment est-il construit ? Sachant qu’à l’époque de l’Épître, on traitait l’empereur comme un dieu, quelle rectification apporte la simple construction de ce verset ? Que dit cette construction sur la relation des chrétiens avec le monde ?
7. Quels sens spirituels peut-on dégager de cet extrait ? En particulier, à quel mouvement intérieur est conduit le lecteur ?
– On peut lire ensuite les extraits des commentaires (LD 4).
– Puis relire le texte attentivement, crayon en main, pour relever chaque détail.
II. Trois conseils techniques
– Saint Pierre achève sont épître en affirmant l’avoir écrite « pour vous exhorter et attester que telle est la vraie grâce de Dieu. » Et de fait il mélange librement l’enseignement sur les mystères chrétiens et l’exhortation morale. Il est intéressant de remarquer les passages et les liens de l’un à l’autre.
– De l’usage des crayons de couleur : pourvu qu’on travaille sur un support qui ne craint rien, il peut être très profitable de colorier des mots ou des passages pour mettre en relief les aspects intéressants, par exemple selon un champ lexical, ou selon un mot ou une racine qui reviennent, ou selon une structure littéraire. Dans notre extrait, on peut faire ce travail pour le champ lexical de la soumission, pour celui de la souffrance, ou pour le mot ‘lui’ chaque fois qu’il commence une proposition (vv. 22-24).
– Les traductions induisant forcément une perte, il est intéressant de consulter le grec, même si on ne sait que l’épeler : certaines racines communes, par exemple, peuvent ressortir alors qu’il est impossible de les repérer en français. C’est le cas ici : un mot du verset 12 a la même racine qu’un autre mot du verset 25 (au début et à la fin, donc), et c’est instructif. On peut aussi s’apercevoir qu’au verset 16 la Bible de Jérusalem a ajouté un mot, dans une interprétation légitime, mais qui ne s’impose pas.
Commentaires
I. Plan de l’Épître
D’après B. SCHWANK, La première lettre de l’Apôtre Pierre, 1967, pp. 11-13
ADRESSE (1,1-2)
1. L’expéditeur (1,1a)
2. Les destinataires (1,1b-2a)
3. La salutation (1,2b)
I. LA GRANDEUR DE LA VOCATION CHRÉTIENNE (1,3-2,10)
A. Louange et action de grâce pour la vocation des destinataires (1,3-12) 1. Louange et action de grâce au Père (1,3-5)
2. Louange et action de grâce pour le salut auprès du Christ (1,6-9)
3. Louange et action de grâce pour la coopération de l’Esprit (1,10-12)
B. La vie du chrétien & le véritable Exode d’Israël (1,13-2,10)
1. Première exhortation : Ceignez vos reins d’espérance (1,13)
2. Deuxième exhortation : Devenez saints (1,14-16)
3. Troisième exhortation : Avancez dans la promptitude à l’obéissance (1,17-21)
4. Quatrième exhortation : Aimez-vous les uns les autres (1,22-25)
5. Cinquième exhortation : Ayez le désir de la parole de Dieu comme des nouveaux-nés (2,1-3) 6. Sixième exhortation : Entrez dans la construction (2,4-6)
7. Résumé : Le peuple saint de Dieu (2,7-10)
II. LES DEVOIRS DE CEUX QUI SONT APPELÉS (2,11-4,11)
A. Exhortations générales et fondamentales (2,11-12)
1. Exhortation au renoncement personnel (2,11)
2. Exhortation à une vie modèle (2,12)
B. Exhortations pour la vie chrétienne de tous les jours (2,13-3,12)
1. Soumettez-vous au pouvoir de l’état (2,13-17) 2. La soumission des esclaves (2,18-25)
3. Les devoirs des épouses (3,1-6)
4. Exhortation adressée aux hommes (3,7)
5. Exhortation finale à toute la maisonnée (3,8-12)
C. Exhortation à la fermeté dans les persécutions (3,13-22)
1. Rendez témoignage de votre espérance dans la persécution (3,13-17)
2. Motivation par le modèle du Christ et la promesse du apteme (3,18-22) D. Exhortation à la fermeté dans les tentations (4,1-6)
1. L’exhortation (4,1-2)
2. Regard sur le passé (4,3)
3. L’étonnement et les moqueries d’autrui (4,4) 4. Perspective sur le jugement final (4,5-6)
E. Exhortations finales pour la vie des communautés (4,7-11)
1. Vous êtes dans le temps de la fin (4,7)
2. Aimez-vous les uns les autres (4,8-9)
3. Rendez-vous service les uns aux autres pour la gloire de Dieu (4,10-11)
III. LE BUT FINAL DE LA VOCATION CHRÉTIENNE (4,12-5,11) A. Souffrez en union avec le Christ (4,12-19)
1. Réjouissez-vous de participer aux souffrances du Christ (4, rz-I4)
2. Souffrez pour la justice (4,15-16)
3. Souffrez dans la conscience du jugement final qui commence (4,17-19)
B. Exhortation aux pasteurs du troupeau de Dieu (5,1-5) 1. Exhortations aux « anciens » (5,1-4)
2. Exhortations aux jeunes » (5,5a)
3. Exhortations pour tous (5,5b)
C. Encouragement final à la constance (5,6-ii)
1. Exhortation à la confiance en Dieu (5,6-7)
2. Exhortation à la vigilance et à la fermeté dans la foi (5,8-9)
3. Perspective sur la gloire éternelle et la louange de Dieu (5,10-11)
CONCLUSION
1. Résumé de la lettre (5,12)
2. Liste des salutations (5,13-14a) 3. Salutation et signature (5,14b)
II. Introduction à l’Épître
Extrait de B. SCHWANK, La première lettre de l’Apôtre Pierre, 1967, pp. 7-10
1. Pierre termine cette première « lettre pastorale » de l’histoire de l’Église (cf. 5, 2-4; 2, 25) en compagnie de Silvain, en disant qu’il a écrit sur le ton de l’exhortation et de l’insistance, pour assu – rer les destinataires qu’ils sont bien sur le vrai chemin malgré toutes les épreuves, qu’ils sont vrai- ment établis dans la grâce de Dieu (5, 12). Que signifie cet établissement dans la grâce de Dieu ?
Pierre en parle à plusieurs endroits. Aux yeux de la foi un esclave par exemple est établi dans la grâce de Dieu lorsqu’il supporte sans haine des peines imméritées (2,19), lorsqu’il fait le bien, lors- qu’il doit souffrir à cause de cela et qu’il poursuit cependant son chemin sans se laisser troubler (2,20). Cette grâce dont les prophètes de l’Ancien Testament ont parlé déjà (1,10) est le but ultime de la vie chrétienne (1,13 ; 3,7 ; 5,10) ; elle est souvent synonyme de souffrance au cours de la vie terrestre : souffrances permises par Dieu, voire agréables à Dieu (3,14). Souffrir selon la volonté de Dieu signifie être établi dans la grâce près de Dieu.
La motivation profonde de cette conception de la grâce réside en ce que l’homme dans la souf- france devient semblable au Seigneur qui porte la croix, à Jésus « qui subissait les outrages sans ri- poster, qui endurait la souffrance sans faire de menaces » (2,23), qui nous a précédés dans la souffrance pour nous laisser un « modèle fa (2,21). Ce chemin de croix chargé de grâce conduisit le Christ à l’élévation à la droite du Père (3,18-22). C’est ainsi que Pierre peut nous crier : Réjouissez- vous lorsque vous participez aux souffrances du Christ, puisque de cette façon vous participerez aussi avec allégresse à la révélation de la gloire éternelle (4,13). L’image de l’établissement dans la grâce constitue la clé pour la compréhension de cette lettre. Mais elle n’est qu’une des nom- breuses images qui sont toutes au service d’un seul but : exhorter, en les consolant, des chrétiens éprouvés par la souffrance.
2. L’exhortation à imiter le Christ, qui constitue la trame de cette lettre, appartient à l’essence même de l’enseignement dans l’Église primitive. Mais, même à d’autres points de vue, on ne connaît pas d’écrit du Nouveau Testament qui reflète de manière aussi directe l’esprit de la com- munauté primitive que cette première lettre de Pierre. Dans ce texte de 105 versets on peut re- connaître tous les points essentiels de la pensée théologique de l’église primitive. Lorsque nous le lisons en le méditant, nous rencontrons à chaque pas les pensées qui nous sont bien connues par la prière du Seigneur et le Symbole des Apôtres, donc par les éléments les plus anciens de la théo- logie chrétienne. (…)
4. La lettre est destinée aux chrétiens baptisés des nombreuses communautés des provinces d’Asie Mineure citées dans 1,1b; ils sont exhortés eu égard à leur dignité de baptisés. Il y a aussi des ex- hortations plus personnelles, qui concernent des états de vie particuliers, aux gens de maison (2,18-25), aux maîtresses de maison (3,1-6), aux époux (3,7) et aux clercs (5,1-5). On rappelle à plusieurs reprises le « genre de vie insensé » d’autrefois (1,18), le temps de « l’ignorance » dans la- quelle on a vécu auparavant (1,14), le culte des idoles et la vie de débauches (4,3). Mais les desti – nataires sont déjà bien familiarisés avec l’Ancien Testament (1,16; 11,9; 3,6). Il est donc vraisem- blable que ces communautés se composaient principalement d’anciens païens, qui — dès avant leur conversion — avaient reçu la circoncision ou qui, du moins, « craignant Dieu », avaient été en contact avec la foi juive en un Dieu unique et avec les saintes Écritures dans la traduction grecque des « Septante ». C’est à des chrétiens de cette espèce, adultes, mûris et éprouvés, situés pleine – ment dans la vie de leur temps, que pense Pierre lorsqu’il les appelle des élus et des étrangers dans la dispersion (1,1).
5. Cette lettre a été apportée par Silvain en Asie mineure aux environs de l’année 64, donc à la veille des persécutions sous l’empereur Néron. Le sang n’a pas encore coulé mais de dures persécu- tions font déjà peser leur menace. On redoute des interrogatoires officiels (3,15), des calomnies et des accusations privées (2,12; 3,16). La foi des destinataires commence à être éprouvée comme l’or dans le feu (1,7; 4,12). Pierre décrit son terrible pressentiment du danger menaçant de l’Anté- christ dans l’image d’un lion rugissant qui va, cherchant qui il pourrait amener à renier sa foi (5,8).
6. C’est pourquoi cette lettre pastorale réconfortante, adressée dans les années soixante du pre- mier siècle aux chrétiens éprouvés par les souffrances, a consolé l’Église persécutée de tous les temps. Dans les ultimes lettres ou messages écrits du fond des cachots ou des prisons on retrouve si souvent des citations empruntées à cette épître. Sa vision croyante de l’histoire du monde est empreinte d’un optimisme profond, qui fait apparaître les épreuves de la terre comme « un peu de temps » (1,6; 5,10) ; elle a sû répandre la consolation et la force même au cours des époques les plus difficiles. Cette lettre du vicaire du Christ est ainsi devenue la lettre par excellence adres- sée aux martyrs : les martyrs de la foi dans le Christ (1,8), de l’espérance dans la vie éternelle (3,15) et de la fidélité à la communauté de l’église.
III. Bède le vénérable
Extrait de son commentaire de la 1ère Épître de Saint Pierre, sur 2,11 et suivant.
« Bien-aimés, je vous exhorte, comme étrangers et voyageurs… » Jusque là, saint Pierre a instruit l’Église de façon générale, expliquant soit les bienfaits pour lesquels la bonté divine nous a appelés au salut, soit les dons par lesquels elle a honoré autrefois les juifs, et nous-mêmes aujourd’hui. À partir d’ici, il encourage fortement les différentes catégories de fidèles à ne pas se rendre indignes, par une vie charnelle, de si grandes grâces de l’Esprit-Saint. De peur que ne déchoient de la gloire d’une noblesse gratuitement offerte ou autrefois promise ceux-là qui, maintenant domptés par la malice des vices, avaient auparavant été désignés d’un titre royal et sacerdotal.
C’est pourquoi il exhorte premièrement les hommes libres et les esclaves, les épouses et les époux, puis, après des exhortations générale, il expose aux anciens et aux jeunes comment se conduire. Il enseigne à juste titre aux libres de s’abstenir des désirs de la chair, car il est courant que la liberté d’une vie plus relâchée tolère les périls plus grands des séductions flatteuses, qui font la guerre à l’âme. En effet, tandis que la chair se laisse subjuguer par les concupiscences enjô- leuses, l’armée des vices s’arme fermement contre l’âme. Il fait bien d’appeler « étrangers et voya-
geurs » ces hommes libres, pour, se souvenant qu’ils ont leur patrie dans les cieux, ils soient moins portés à soumettre leur âme aux choses terrestres.
Car habituellement, une chose distingue dans cette vie les élus et les réprouvés : les élus, voya- geurs et exilés pour l’heure, sont tendus vers la Patrie pour le futur ; ils se délectent d’autant moins dans ce temps des plaisirs passagers qu’ils espèrent recevoir dans l’autre la joie sans fin, et régner éternellement avec le Christ. Mais les réprouvés ont ici-même leur patrie, de laquelle ils ne savent tendre qu’aux désirs de la vie ; c’est pourquoi, ils sont rejetés après cette vie dans un exil perpétuel où, privés de toute volupté et dans les tourments, ils n’auront que malheurs à endurer.
« Afin que, là même où ils vous calomnient… » Il arrive très souvent que des païens, critiquant au- paravant la foi des chrétiens à cause de l’abandon de leurs dieux, cessent leurs reproches après avoir observé leur conduite chaste et leur constance dans le Christ ; et même, ils se mettent à glo- rifier et louer Dieu, dont la bonté et la justice sont prouvées par l’honnêteté et la droiture de ses adorateurs. « [Ils] glorifient Dieu au jour de Sa visite, » c’est à dire au jour de la rétribution : com- bien grande sera la gloire que Dieu vous donnera, déjà maintenant les incrédules le reconnaissent après vous avoir vu Lui rester fidèles coûte que coûte parmi les périls qui vous font obstacle.
« Soyez donc soumis à toute créature humaine, à cause de Dieu. » Il dit à toute créature humaine, à toute dignité humaine, à toute personne ou à tout principat : la disposition divine a voulu que nous y soyons subordonnés. C’est en effet ce qui est dit ailleurs : « À cause de Dieu, car il n’y a pas d’autorité sinon venant de Dieu. Et qui résiste à l’autorité résiste au plan de Dieu. » (Rm 13) Et pour préciser de quelle créature humaine il parle, il continue :
« Soit au roi, comme au souverain… » Il dit seulement « au rois et aux chefs », et non aux maîtres, car il instruit à part les maîtres d’esclaves, comme nous le disions plus haut. Mais aussitôt après, il avertit à leur tour les esclaves sur la façon d’être au service de leurs maîtres. Il enseigne donc les fidèles, c’est à dire les serviteurs du Roi éternel, à être soumis également aux autorités de ce monde, pour éviter notamment de pouvoir être critiqué dans la foi et la religion chrétiennes à cause du fait qu’elles bouleversent les règles de la condition humaine. Car on peut aussi com- prendre ainsi sans faire d’erreur ce qui est dit, À toutes créatures humaines, de telle sorte que cela désignent et les autorités ayant la foi et les autorités païennes.
« Pour la punition de ceux qui font le mal et pour l’éloge des bons. » Il n’affirme certes pas que tous les rois ou chefs savaient punir les malfaiteurs et louer les bons, mais il exprime simplement quelle devait être l’action du bon juge : châtier les malfaiteurs et récompenser ceux qui faisaient le bien. Et quoique lui, le juge, commette l’injustice de condamner les bons, ce faisant il ajoute en- core plus à leur éloge, à condition que les bons supportent patiemment son improbité et résistent patiemment à sa bêtise. Tu veux (ajoute-t-il) ne pas craindre les autorités ? Fais le bien, et tu en re- tireras un éloge. Il n’est pas dit que le pouvoir fera un éloge, mais qu’on en retirera un éloge. En effet, quoique l’autorité humaine ne fasse pas d’éloge, mais qu’au contraire, elle poursuive, elle tue par le glaive comme elle l’a fait pour Paul, elle crucifie comme elle l’a fait pour Pierre, tu en re – tireras un éloge, étant donné que la patience de ta vertu mérite une couronne de louange à cause de cela : le pouvoir te fait du mal, à toi le juste et l’innocent. (…)
« Comme des enfants, et non pas comme considérant la liberté comme un vêtement pour la ma- lice. » Ils font le bien comme des enfants, qui plus ils font usage de leur liberté auprès des hommes, plus ils en font usage de manière restreinte ; bien au contraire, c’est plus librement qu’ils sont soumis au service divin. Mais ils font aussi le bien comme des enfants, ceux qui par l’exemple du patriarche Joseph, bien qu’ils soient écrasés par l’asservissement des hommes, ne sont poussés par aucune conduite à être serviteurs des vices. Mais pourtant ils transforment leur liberté en vê- tement de malice, ceux qui sont d’autant moins contraints par le joug de l’esclavage de l’homme qu’ils sont largement voués à l’influence des pécheurs, et lorsqu’ils servent leurs vices sans se faire punir, ils appellent cela liberté, couvrant de ce nom leur faute. Or, on peut également recevoir d’une manière générale ces mots de l’apôtre Paul : vous mes frères, vous avez été appelés à la li- berté, cependant n’abandonnez pas votre liberté dans les suggestions de la chair. Nous sommes justement nommés enfants, nous qui avons été absous de la marque des péchés grâce au bap- tême ; rachetés de l’asservissement au démon, puisque nous avons été faits enfants de Dieu, nous n’avons pas reçu pour autant la permission de pécher par un grand don de liberté ; bien au contraire, si nous péchons, notre liberté bientôt perdue, nous devenons des esclaves du péché. Et quiconque pense être libéré de Dieu au point de pécher en toute licence transforme sa liberté en vêtement de malice. Or, Pierre veut que nous soyons heureux, libres de la servitude engendrée par les péchés, de telle sorte que nous puissions rester des serviteurs bons et fidèles de notre Créateur.